ELEPHANT BLANC D'ANDERLECHT

E B A

Le Passé du Groupe de l'Eléphant Blanc d'Anderlecht

1936 - XXe anniversaire du Groupe de l'Eléphant Blanc - Discours de P. Maezele



Mesdames.

Messieurs,

Chers Frères Scouts,

Vous savez tous pourquoi nous sommes réunis aujourd'hui : nous commémorons, solennellement et simplement à la fois, la fondation du Groupe de l'Eléphant Blanc.

27 juillet 1916 !

Pour les jeunes, une date lointaine, sortant de leur vie propre, des souvenirs confus, des réminiscences de récits entendus, de leçons, de lectures ; pour les plus de trente ans, le pénible rappel d'une jeunesse difficile, tourmentée, avec l'angoisse du lendemain, une alimentation précaire, insuffisante et malsaine, de sourds grondements de canon, ininterrompus, obsédants ; pour ceux des générations précédentes, l'horrible vision d'une tuerie sanglante, une crainte mortelle des instants à venir, une vie d'épouvanté et de désespoir, une frayeur panique, la perpétuelle, l'hallucinante incertitude sur le sort d'êtres chers...

27 juillet 1916 !

Dans l'effroyable tourmente, certains se préoccupent de l'avenir. Des hommes mûrs, dont les fils se battent et qui mesurent, sidérés, la profondeur de l'abîme vers lequel l'humanité, affolée, est entraînée. Des jeunes aussi, trop jeunes pour aller au carnage, mais qui comprennent déjà et qui se rendent compte du redressement qu'il va falloir opérer, de la tâche immense que sera celle des générations montantes. Les voies se cherchent ; c'est vers la jeunesse qu'elles se dirigent, c'est elle qu'il faudra atteindre, c'est elle qui formera la société de demain, c'est elle qui devra construire un monde meilleur.

En Belgique, déjà avant la guerre mondiale, un mouvement de jeunes avait vu le jour. Il avait à son programme une réaction violente contre la mollesse engendrée par la civilisation outrancière; il entamait une lutte décidée contre la veulerie et l'avilissement des caractères; il prenait la jeunesse et la soustrayait aux pernicieux exemples que, trop souvent, lui donnaient les aînés et s'efforçait de lui faire mener une vie simple, teintée d'aventure et de romanesque, mais génératrice de courage réfléchi, d'énergie calme, de loyauté et de droiture, d'amour sincère pour le prochain. Ce mouvement de jeunes, c'était le scoutisme. La débâcle mondiale l'avait trouvé en pleine croissance, en pleine prospérité. Un grand nombre de ses dirigeants partirent au front. D'autres ramassèrent le flambeau.

Dans notre humble commune, ce fut un tout jeune étudiant qui eut ce rare mérite : il s'appelait Frantz Vanlangendonck. Sans soutien dans la vie, obligé de pourvoir seul à ses besoins matériels, farouchement décidé à poursuivre ses études et à se créer une situation par ses propres forces, à une époque dont je viens de rappeler, combien faiblement, les funestes caractéristiques, il eut l'admirable courage de penser encore aux autres et de leur consacrer une solitude incessante. Il avait été séduit par le scoutisme, par son souffle d'idéalisme, par son désintéressement, par le côté passionnant que son fondateur, Baden-Powell, avait su lui donner.

Il l'avait pratiqué pendant quelque temps, dans une commune voisine, comme jeune chef. Ce fut chez nous qu'il était appelé à donner sa pleine mesure. Devenu interne à l'hôpital d'Anderlecht, il fonda, le 27 juillet 1916 avec quelques éléments qu'il avait laborieusement recrutés, le District d'Anderlecht des Eclaireurs de Belgique, groupement de scoutisme neutre auquel il était lui-même affilié. Malgré les difficultés matérielles que les jeunes gens éprouvaient à s'équiper, malgré les nombreuses entraves que l'occupant mettait à la pratique du scoutisme, prohibant notamment le port de l'uni forme la nouvelle organisation connut bientôt une belle vitalité. D'autres adolescents y prirent des postes dirigeants. Parmi ceux-là, il convient de rappeler le souvenir et de rendre un hommage ému aux Verschueren, Backaert, De-bock, Vanderbruggen, Kinnaer, Vandeputte, Bittre-mieux. Ce fut le temps héroïque du scoutisme dans notre commune. Des équipements rudimentaires, un matériel réduit au strict minimum, souvent même totalement insuffisant, la crainte ininterrompue d'être surpris, au cours des excursions et des jeux, par une patrouille de soldats ennemis ; malgré cela, un allant admirable, un esprit de sacrifice et d'abnégation comme seule la jeunesse est capable d'en montrer, grâce à son immunisation, trop brève hélas, contre le scepticisme démoralisateur et l'indifférence fataliste que la vie moderne communique à toutes les natures.

Cette période, vous, les jeunes scouts qui m'écoutez, tâchez de vous en souvenir de temps en temps. Dites-vous bien que si vous faites des camps merveilleux, des excursions inoubliables ; si vous avez le rare bonheur de connaître cette unique atmosphère de fraternité et d'amitié loyale qui règne au sein de notre groupe, dites-vous bien que c'est à ces pionniers que vous le devez ; c'est à notre fondateur, à celui qui ne se laissa rebuter ni par les revers, ni par les déceptions, ni par l'ingratitude, ni par l'hostilité, ni par l'incompréhension, ni par les moqueries, c'est à celui qui brava, calmement et froidement, tout cela, que vous devez d'être scout à votre tour. C'est à ses disciples de la première heure, à ceux qui épousèrent sa cause, qui se firent les propagandistes infatigables du scoutisme, que vous devez d'avoir connu d'autres chefs, qui, à leur tour, s'efforcèrent de vous faire éprouver toutes les joies qu'ils avaient goûtées eux-mêmes. Ces choses-là ne se disent pas tous les jours ; on les sent, on s'en rend compte, on les oublie quelquefois ; mais il est juste, il est nécessaire qu'en des jours comme celui-ci elles soient dites, en toute sincérité, en toute simplicité, avec le sentiment d'infinie reconnaissance que nous éprouvons en y songeant.

Que dire de l'existence déjà longue de notre Groupe ?

L'armistice, avec sa vague d'enthousiasme débordant, favorisa les mouvements qui, comme le nôtre, sont empreints d'idéal. Les scouts affluèrent. Le groupe connut des effectifs très nombreux.

Les Eclaireurs de Belgique fusionnèrent avec les Boy-Scouts de Belgique, autre mouvement de scoutisme neutre. Le District d'Anderlecht s'entendit avec d'autres troupes de l'agglomération bruxelloise appartenant aux Eclaireurs de Belgique et forma avec elles un groupe dénommé Eleuthéra-Bia (Liberté-Force). Les deux initiales du titre rappelaient les initiales de l'ancienne Fédération.

Avec Gaston Bittremieux, le seul des premiers collaborateurs du fondateur resté en activité, d'autres chefs avaient succédé aux anciens : ce furent Jean Holbrechts et Guillaume Van Antwerpen.

Trois troupes existaient à ce moment : la 3e, la 5e, la 8e. Les chefs firent d'admirables efforts pour développer la jeune organisation ; l'esprit scout, ce fameux esprit qu'il est si difficile de caractériser, mais qui résume toutes nos aspirations, toute notre soif d'idéal, l'esprit scout fut dispensé et inculqué aux jeunes éléments avec une fougue, une conviction, une véritable foi d'apôtre. Je me souviens, non sans émotion, puisque c'est vers cette période que je fus initié moi-même à ces joies simples et profondes et que je contractai ces amitiés indéfectibles dont je suis fier et qui me sont si précieuses, je me souviens des causeries qu'on nous fit, des discussions que nous eûmes, de cette foi robuste dans un meilleur devenir qu'on me communiqua et qui devait rester en moi comme une empreinte indélébile.

Cette deuxième promotion de Chefs fut, si on peut dire, celle qui assit véritablement l'œuvre si difficilement commencée. C'est de leurs mains surtout que sont sortis tous ces anciens qui sont ici, autour de nous, c'est leur esprit qui a été modelé, pétri par eux ; ils sont les vivants témoignages de la valeur, de la profondeur du travail accompli. C'est eux qui, à quinze ans de distance, ont fourni à notre Amicale d'Anciens, si prospère et si vivante, la plus importante partie de ses dirigeants. Eux-mêmes y sont encore, y occupent des postes de combat ^ pas un instant, ils n'ont cessé de songer au Groupe, à ses destinées, à ses besoins et ils consacrent tout le temps que leur laissent la vie familiale et leurs occupations professionnelles à essayer de lui être utile.

Et puis, le temps s'écoule... Le groupe accueille des garçons, des jeunes gens... On les initie au scoutisme... Ils en emportent de précis souvenirs ; leur personnalité se forme, se développe, se stabilise sous l'égide de la Loi du Scout... Ils partent, absorbés par la vie, leurs obligations ; ils partent et d'autres viennent... L'organisation reste debout...

En 1922, des divergences de vues entre les Chefs du Groupe Eleuthéra-Bia, la mort de certaines troupes, la difficulté de relations suivies, amenèrent le District d'Anderlecht à prendre son indépendance complète ; il ajouta la lettre A (Anderlecht) aux deux initiales précédentes et devint le groupe E.B.A. : Eléphant Blanc, Anderlecht.

Au début de 1924, j'eus l'insigne honneur d'être désigné, par le fondateur du Groupe, comme son successeur. Fier de la confiance qui m'était témoignée, conscient de la lourde responsabilité qui m'incombait, heureux, au surplus, de pouvoir me consacrer entièrement à ce qui était devenu réellement une de mes principales raisons de vivre, j'eus l'unique ambition de servir le groupe et de créer, autour de moi, l'atmosphère qui m'avait attiré au scoutisme. J'essayai de faire moi-même œuvre d'apôtre. La tâche fut difficile. Des incompréhensions, des erreurs légères, mais lourdes de conséquences pour une organisation comme la nôtre où, les aspirations étant élevées, les déceptions sont forcément nombreuses et profondes, les difficultés de la vie matérielle, tout cela avait, entretemps, amené les chefs à quitter le groupe. Je restai seul, avec, pour tâche, de former les futurs dirigeants et d'assurer la continuité de l'œuvre qui m'avait été confiée. J'eus le rare bonheur, après une période de tâtonnements, de trouver, malgré tout, les collaborateurs indispensables. Au début, ce furent encore Jean Holbrechts et Guillaume Van Antwer-pen qui, infatigables, m'apportèrent le concours de leur compétence et de leur dévouement. Ils dirigèrent chacun une troupe. Puis, la vie les prit. Je dus réunir en une seule troupe tous les scouts du Groupe. Cette troupe, ce fut la 18e, qui pendant de longues années, devait rester la seule qui représentât le scoutisme dans la commune. Elle connut une belle existence et je suis sûr que tous ceux qui sont présents ici et qui en firent partie, se souviennent avec émotion et regret des beaux moments qu'ils y vécurent. Cette 18im troupe me permit d'assurer la formation des jeunes éléments qui étaient appelés à continuer le travail des aînés. Une patrouille spéciale y fut constituée, ayant pour emblème le Pélican, qui, dans une touchante légende, symbolise le dévouement poussé jusqu'au sacrifice. Cette initiative avait pour but d'entraîner les futurs chefs, de compléter leurs connaissances et de leur faire comprendre toute la beauté du rôle qu'ils étaient appelés à jouer. De cette patrouille. qui existe encore à l'heure actuelle, sortirent tous les chefs qui remplirent une mission importante dans l'existence ultérieure du groupe. Ce fut Edmond Lekimme, qui me succéda à la tête de la 18e troupe et qui eut l'occasion d'y montrer ses qualités d'entraîneur, de très bon chef ; ce fut Louis Piette, le jeune meneur souriant et convaincu ; ce lut Jean Juwet, le plus populaire sans doute de tous nos " grands ", le routier universel, rédacteur au journal, chansonnier, boute-en-train, au bon sens robuste, à l'esprit ouvert et subtil, à qui ses nombreuses qualités valurent récemment l'honneur d'être appelé aux fonctions de Chef de Groupe-adjoint ; ce fut Alexis Leys, à qui fut dévolue la tâche ingrate de reformer une ancienne troupe, la 19e, et qui la mena à bien avec une conscience et une abnégation dont j'ai vu rarement l'exemple autour de moi ; ce furent Lucien Kleynnaert, Adolphe Genot et Jean Leys, qui, tous, montrèrent qu'ils avaient compris la sobre grandeur de l'effort qu'on attendait d'eux et qui le firent avec allant, avec enthousiasme, avec discernement. Ce furent encore nos routiers, nos " plus de dix-huit ans ", les grands frères, l'âme et la réserve du groupe, la garde, pourrait-on dire, ceux sur qui on compte pour les " coups durs ", qui sont là quand on les réclame et qui viennent encore de le prouver dans la préparation de ce 20e anniversaire.

Ce sont eux qui ont permis, au moment où, à mon tour, je fus " pris par la vie ", que le groupe vive; ce sont eux qui ont son avenir en main, c'est en eux que repose mon espoir dans un plus grand développement et une plus grande prospérité de notre œuvre. Je suis heureux de pouvoir le leur dire en ce moment : quand je les vois autour de moi attentifs et prêts à répondre au moindre appel ; quand je lis dans leur regard clair et franc, leur ambition de " servir ", quand je les vois au travail, pénétrés de leurs responsabilités, comme de vrais scouts, je me sens récompensé, au delà de toute expression, de ce que j'ai essayé de faire pour le mouvement. C'est en eux que j'ai trouvé et que je trouve encore le réconfort dans des moments de découragement ; c'est d'eux que me vient la conviction que le scoutisme n'est pas un leurre, que l'idéal de bonté et de fraternité que nous poursuivons n'est pas une utopie. Ils me donnent aussi l'assurance que le travail fourni dans le passé n'est pas perdu et que les jeunes sont confiés à des guides sûrs...

Ce bref historique du Groupe de l'Eléphant Blanc, cet hommage mérité à ceux qui travaillèrent à son développement, serait incomplet s'il passait sous silence l'aide que nous rencontrâmes au dehors. Et, en tout premier lieu, il convient de souligner la bienveillance et l'appui que nous trouvâmes auprès de M. le Sénateur Démets, l'ex-bourgmestre d'Anderlecht et Président de notre Comité de Groupe. Pour citer des faits précis, il fit obtenir au Groupe, en 1920, un subside de l'Administration Communale, s'élevant à la coquette somme de 3.000 francs, destiné à l'achat d'équipements pour les scouts et de matériel de camping. A cette occasion, il défendit le scoutisme, au Conseil Communal, dans un discours remarquable. Plus tard, il nous aida puissamment à obtenir l'autorisation d'occuper des locaux communaux, notamment la gare de Cureghem et l'école de la rue du Chapeau... Nous rencontrâmes toujours auprès de lui une compréhension très exacte de notre mouvement, de ses méthodes, de son esprit ; il sut toujours nous apporter l'aide opportune. Jamais il ne nous marchanda son soutien. Il a droit, largement, à la gratitude de tous ceux qui ont passé dans nos rangs.

D'autres mandataires communaux, également, nous aidèrent efficacement: ce fut le défunt échevin Guillaume Melckmans, qui nous permit de disposer de notre local actuel, dans l'école de la rue de la Procession ; ce fut M. le bourgmestre Lambert, à l'intervention duquel nous devons le rare avantage de pouvoir occuper ce terrain, propriété communale, qui est destiné à voir l'édification, par nos propres moyens, de notre propre local. Ce fut notre bon camarade Alban, membre de l'Amicale des Anciens sans avoir jamais fait de scoutisme, qui, à plusieurs reprises, nous soutint largement de ses deniers. Enfin, tout récemment, ce fut M. le notaire Clara, qui eut la grande obligeance de nous céder le petit baraquement que nous avons reconstruit ici et qui, espérons-le, sera l'embryon du home scout que nous espérons tant voir s'élever bientôt.

Il me reste maintenant, Mesdames, Messieurs, Chers Frères Scouts, à vous dire quelques mots d'un événement qui, dans la vie du groupe, eut une importance capitale. Cet événement se place en 1933.

Depuis longtemps, nous avions senti, au Groupe, la nécessité de créer, à côté de l'organisation scoute proprement dite, un centre de rayonnement, un foyer de propagande plus puissant et plus efficace que nos troupes elles-mêmes. Celles-ci, composées de jeunes gens et d'enfants entièrement absorbés par le mouvement, ne pouvaient que difficilement consacrer à la propagande et au financement le temps et les efforts nécessaires. Pour remédier à ce défaut du Groupe, pour parer à cette faiblesse, qui pouvait être mieux qualifié que ceux qui étaient sortis de chez nous, qui avaient connu eux-mêmes les bienfaits de l'œuvre, qui étaient vraiment capables d'en apprécier la beauté et l'utilité incontestable ? Oui, mieux qu'eux, connaissait les difficultés matérielles dans lesquelles le groupe s'est toujours débattu et l'impérieuse nécessité qu'il y avait, si nous voulions posséder une organisation forte et solide, à être débarrassés de ces soucis financiers ? Ces anciens, ceux de la première heure comme ceux qui vécurent des temps moins durs, devaient prouver que nos espoirs étaient largement fondés. Ils répondirent, au premier appel qui leur fut adressé, plus nombreux que nous n'aurions jamais osé le supposer. Et, tout de suite, ils formèrent cette Amicale d'Anciens Scouts d'Anderlecht, qui, comme par miracle, regroupa un grand nombre d'anciens chefs et d'anciens scouts qui s'étaient perdus de vue depuis des années. Depuis trois ans et demi, cette Amicale connaît une activité trépidante. Elle fonda différentes sections, ouvertes même à ceux qui n'ont jamais fait du scoutisme, et qui sont autant de centres permanents de propagande. Sa fameuse section sportive se distingua rapidement et remporta maint trophée envié ; sa section dramatique se produisit brillamment à plusieurs soirées ; sa section de tir, qui en est encore à ses débuts, connaîtra certainement la prospérité ; une section de camping est à l'étude.

L'Amicale apporta au groupe une aide financière considérable : elle dota les sept tentes de patrouille de doubles toits splendides, ceux mêmes qui nous abritent en ce moment ; elle nous offrit également une merveilleuse tente de cuisine, qui nous a rendu d'inappréciables services. Cela sans préjudice des nombreuses interventions de toute nature que sa sollicitude valut aux scouts et au Groupe lui-même.

Plusieurs Anciens sont à citer hors-pair dans cette belle pléiade : d'abord, les deux Présidents, Rémy Vandeputte. un des plus anciens scouts du Groupe, et Michel Gewelt, qui prodigue son temps, son travail, son argent même, avec un optimisme souriant, une patience inlassable et une persévérance intensément consciente de l'importance de la tâche à accomplir. Ensuite, les deux secrétaires, Jean Juwet, que j'ai déjà cité plus haut, et Frédéric Martin. Tous deux remplirent leur rôle avec précision, avec dévouement. Ils furent ce qu'ils devaient être : les deux chevilles ouvrières du cercle. Il y a encore les deux trésoriers - tout va par couple, dans cette Amicale Emile Mievis et Gaston Bittremieux ; deux trésoriers modèles, âpres à l'encaissement, durs à la dépense. Ensuite, Jean Holbrechts, vice-président de l'Amicale, qui apporte dans ses fonctions la même scrupuleuse objectivité que celle qu'il mit au service de sa troupe. Il y a aussi tous les dévoués obscurs occupant des postes sans gloire, mais où le travail ne manque pas : les Timmermans, les Grave, les Nélis, les Peeters. Ce sont, peut-on dire, les Routiers de l'Amicale, ceux aussi que l'on réserve pour les " coups durs " et qui sont là, toujours, quand on les appelle. Il y a enfin, tous les membres de l'Amicale, que leur amour du scoutisme et les souvenirs qu'ils en ont emportés ont regroupés pour servir encore, dans la mesure de leurs moyens, cette œuvre à laquelle ils sont si fortement attachés.

Ces Anciens, nous, les scouts actifs, nous en sommes fiers. Nous leur rendons hommage, sincèrement, et nous nous rendons exactement compte de ce que nous leur devons. D'abord, parce qu'ils ont été les précurseurs, les initiateurs; ensuite, parce qu'ils continuent à nous soutenir et à nous aider de toutes leurs forces, de toutes leurs possibilités. Nous les appelons les Anciens, non pas parce que nous estimons qu'ils ne sont plus scouts, mais parce que nous mettons dans cette appellation un affectueux respect pour ceux qui ont connu le scoutisme avant nous et qu'ils nous ont montré qu'on est scout toujours si on a eu le bonheur de goûter réellement les joies intimes que ce terme concrétise. Et nous avons voulu que cette opinion que nous avons d'eux soit exprimée autrement que par des mots ; nous avons voulu qu'ils soient entièrement assimilés aux scouts plus jeunes, plus actifs qu'eux dans le mouvement proprement dit. Lorsque, il y a quelques mois, le groupe, après s'être détaché, en novembre 1932, des Boy-Scouts de Belgique, peur des raisons toutes particulières et beaucoup trop complexes pour être détaillées ici, lorsque le groupe décida de rappeler à la vie l'ancienne Fédération des Eclaireurs de Belgique, les statuts, élaborés surtout par de plus jeunes, contenaient un hommage, direct et sincère, aux Anciens: ils permettaient l'affiliation de ces derniers, au même titre que les jeunes scouts.

Et aujourd'hui, je suis doublement heureux. Je suis heureux, non seulement à cause du brillant anniversaire que nous fêtons, mais également parce que j'ai désiré en profiter pour remettre, officiellement, au nom de la Fédération des Eclaireurs de Belgique que j'ai l'honneur de présider, ce fanion au Président de l'Amicale des Anciens Scouts.

Mon cher Michel, sois convaincu que c'est avec une confiance inébranlable que je te confie cet emblème ; je sais, par une longue expérience, quelle est la valeur de celui à qui je le confie ; je sais que les idées d'altruisme, de fraternité, de loyauté, de droiture qu'il représente seront âprement défendues par ton Amicale. J'invite ceux que nous sommes habitués à nommer " les jeunes " à pousser en l'honneur des Anciens le cri de joie que nous avons créé pour la circonstance.

Mesdames, Messieurs, Chers Frères Scouts, j'ai fini ce que je ne veux pas appeler " mon discours ". S'il est long, si je l'ai lu au lieu de vous parler directement, c'est que j'ai tenu essentiellement à ne rien oublier des nombreuses choses que j'estimais devoir vous dire. En des jours comme ceux-ci, il faut faire la part de l'émotion inévitable qui paralyse la pensée et rend son expression si difficile. Or, notre mouvement est trop noble et trop vivant, notre groupe a un bien trop beau passé pour laisser échapper l'occasion, dans des circonstances comme celles-ci, de mettre en valeur toutes les difficultés qui ont entravé son ascension, tous les dévouements qu'il a suscités. C'est dans ces émouvants souvenirs que nous retremperons notre foi en ses destinées, que nous puiserons la conviction que le groupe de l'Eléphant Blanc vivra, toujours plus grand, toujours plus puissant, toujours plus scout.

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Jean Marc De Bock